Semer le changement : Point of View milite pour les droits et libertés de tous les genres et de toutes les sexualités

Comment les membres d’APC améliorent-ils le quotidien de leurs communautés ? Nous présentons dans cette chronique des récits qui soulignent l’impact et les changements opérés par nos membres, avec l’aide de subventions secondaires d’APC. En Inde, l’organisme Point of View (POV) mène des recherches novatrices et originales à l’intersection de la sexualité et des technologies. POV œuvre à transformer les normes en ligne en faveur de l’émancipation des genres marginalisés.

Il y a 25 ans, l’organisme Point of View, basé à Mumbai, était fondé dans le but de travailler sur les questions de genre et de droits sexuels en Inde. C’est en 2011 que POV entame son partenariat avec APC et son Programme des droits des femmes. L’organisme reçoit alors une subvention secondaire par l’entremise d’EROTICS – le réseau de Recherche exploratoire sur la sexualité et l’internet. Depuis, POV est un membre actif d’APC et sa directrice générale, Bishakha Datta, a récemment siégé au conseil d’administration d’APC en tant que présidente.

Par son travail de recherche, ses publications et ses campagnes, POV contribue énormément à construire et amplifier les voix des femmes et des personnes de la diversité des genres marginalisés. L’organisme participe activement à faire tomber les barrières qui entravent la libre parole et la libre expression en Inde. Par le biais de l’analyse, des médias, de l’art et des technologies, POV produit des connaissances et plaide auprès de la société civile pour renforcer les capacités et la sensibilisation en faveur des droits et libertés pour toutes les sexualités et tous les genres.

Imaginer l’émancipation des genres en ligne

En 2019, POV s’appuyait sur les Principes féministes de l’internet (PFI) pour organiser le colloque « Imaginer un internet féministe : Asie du Sud ». L’événement s’est construit dans l’esprit de « transformer les normes en ligne pour permettre aux femmes, aux filles et aux personnes de genres marginalisés de participer activement aux espaces numériques, avec agentivité, autonomie et dignité ». Grâce à une subvention d’APC qui venait compléter le financement principal d’un autre bailleur de fonds, l’événement a pu avoir de plus grandes retombées, notamment en doublant la participation et en l’élargissant au-delà des frontières indiennes. Ce genre de flexibilité s’avère utile et pratique pour les organisations, car il leur permet d’agir en fonction de besoins spécifiques à leur travail et d’amplifier leur impact. Comme le souligne la directrice générale Bishakha Datta, « Les subventions secondaires sont un bon moyen pour tester des germes d’idées. »

Dans le cadre du colloque « Imaginer un internet féministe », POV a pu se concentrer à étudier comment les politiques publiques peuvent favoriser le changement dans les normes de genre et comment les mouvements sociaux jouent un rôle majeur dans la promotion et le soutien des genres. Ces questions sont particulièrement pressantes quand l’on considère que « les défenseur·e·s des droits humains, les femmes et les minorités de genre s’exposent à de graves conséquences lorsqu’elles s’expriment en ligne, sans compter le climat régional actuel de forte répression politique envers les dissident·e·s. » La subvention secondaire accordée à ce projet a aidé POV à tendre vers son objectif de construire « des initiatives féministes collectives et transformatrices qui permettent aux femmes et aux personnes de genres marginalisés de remettre en question les espaces et réseaux numériques dominants et d’y participer pleinement. »

Explorer les relations entre liminalité du corps, vie privée et données

En 2018, POV a participé à un important projet de recherche, initié par le Internet Democracy Project, qui examinait la protection des données et la vie privée dans une perspective féministe. Prenant en compte la présence maintenant généralisée de l’intelligence artificielle dans nos sociétés, l’organisme a contribué de façon considérable aux débats sur la gouvernance des données, et ce, en utilisant un cadre d’analyse féministe pour repenser les concepts de vie privée et de données.

Selon Datta, cette étude essentielle, soutenue par une petite subvention d’APC, a pu combler une lacune importante dans la recherche : « Nous devons repenser ce que signifie la protection des droits humains à une époque où les données appartiennent désormais aux frontières de nos corps. » Dans le cadre de cette étude, il a été constaté que l’oppression des femmes est liée aux « attentes restrictives en matière de vie privée » et au « fardeau de “demeurer dans la sphère privée” » à une époque où la surveillance et la collecte de données sont plus répandues que jamais.

Écrire à l’intersection des sexualités et de la technologie

Les recherches novatrices menées par POV ont aussi été mises en l’avant en 2016, lorsque l’organisme s’est associé à des autrices et auteurs d’Inde pour étudier les relations entre sexualité et technologie. POV souhaitait créer un espace de soutien où les personnes de la diversité des genres pourraient explorer des questions qui les touchent directement, à l’aide d’analyses approfondies et de créativité. Pour reprendre les mots de Datta : « Nous voulions lancer une nouvelle publication en ligne appelée Deep Dives : Sexing the Interwebs, et utiliser le récit “long format” pour vraiment explorer l’intersection du genre, des sexualités et des technologies numériques. » Grâce à une petite subvention, des sujets comme « les femmes et les jeux sur téléphone mobile, le parcours d’une femme trans à travers le porno, les réseaux asexuels en Inde, une journée dans la vie d’une travailleuse du sexe, handicap et technologie » ont pu être abordés.

La série Deep Dives a reçu un accueil très favorable, suscitant l’attention des médias et remportant même des prix, et elle continue d’avoir un impact avec de nouvelles recherches et de nouveaux champs thématiques tels que « Bodies of Evidence » et « Agency or Age ? ». Comme l’explique Datta, « Les choses évoluent désormais rapidement. La recherche universitaire met un certain temps à rattraper son retard. Nous avons donc estimé qu’une bonne façon de produire des savoirs était d’aller plus loin que le journalisme contraint à des articles brefs, et de combler l’espace entre ce type d’articles et les articles académiques. »

Les informations présentées dans cet article sont tirées du rapport « Poursuivre le dialogue : Leçons tirées des subventions secondaires d’APC ». Ce rapport présente les résultat d’entretiens et d’enquêtes auprès de notre équipe de travail ainsi que des membres et partenaires d’APC qui ont bénéficié d’un financement à travers notre programme de subventions secondaires, soutenu par l’Agence suédoise de coopération internationale au développement (Sida), ou de nos autres subventions secondaires proposées dans le cadre de projets d’APC.

Cette histoire vous a inspiré·e à semer les graines du changement dans votre communauté ? Écrivez-nous pour nous raconter votre histoire à l’adresse suivante : communications@apc.org

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