Points d’échange internet : va-t-on payer moins cher l’internet au Cameroun ?

Par Sylvie Niombo Éditeur AZUR Développement     Douala,

«L’internet coûte encore cher au Cameroun. Quelle est la solution ?» s’est interrogé un participant aussitôt après la communication d’Olivier Leloustre, Directeur Général de Ringo, un fournisseur d’accès internet et le Président du Cameroon Internet eXchange Association (CIXA) sur les points d’échange internet.

Au Cameroun, il y a plus de 60 fournisseurs d’accès internet, un million d’abonnés et près de 5 millions d’ici 5 ans, selon la Banque mondiale. C’est dire que la demande est forte et d’importants investissements sont consentis en matière d’infrastructures et de services. Ces avancées et espoirs sont possibles grâce au vote de la loi sur les communications électroniques et ses décrets d’application sortis et en cours ; ainsi qu’aux câbles SAT-3, WACS et CAB.

Il existe désormais un point d’échange internet au Cameroun, comme l’a annoncé Olivier Leloustre ; qui profite pour l’instant à quatre opérateurs.

Il a expliqué que la mise en place d’un point d’échanges internet nécessite la participation de nombreuses parties prenantes : ministère, agence nationale des TIC, fournisseurs d’accès internet, opérateurs de télécommunications et de services à valeur ajoutée, fournisseurs de contenus, secteur de l’enseignement, entreprises de e-commerce et administrations de l’Etat.

Il y aurait près de 78 points d’échange internet dans le monde, et le CIXA a été développé sur un modèle multi-acteurs, neutre, indépendant et à but non-lucratif.

Au sujet des coûts, il a expliqué que « le trafic local transite par le réseau international. Cela entraîne des coûts à l’aller et au retour, ainsi que des temps de latence, car le trafic fait le tour de la terre, et cela entraîne une réduction des capacités de la bande passante ».

C’est ainsi que la solution de créer des points d’échange internet permet de contourner cela car le transit via ce point reste local.

A l’origine, l’Agence nationale des technologies de l’information et de la communication (ANTIC) avait lancé un appel d’offres il y a trois ans pour la création d’un point d’échanges internet ; mais les parties prenantes n’y avaient pas répondu à ce moment là.

Pauline Tsafak Doumessi, experte en économie et finances des télécommunications auprès du Ministère des postes et télécommunications au Cameroun a rappelé que « le Ministère de la communication a sensibilisé les fournisseurs d’accès internet sur l’importance du point d’échange internet. Et que la réglementation n’avait rien prévu en ce sens, et cela a donc retardé la création de ce point d’échange ».

Pour réussir à monter ce point d’échange, trois ans plus tard, cinq membres fondateurs ont débuté un processus qui a duré deux ans. Pour le président de CIXA ; le plus difficile a été de mettre tous les opérateurs en accord, mais aussi la disponibilité des décideurs aux réunions de préparation.

À la surprise de quelques participants, mettre un point d’échange internet n’est pas si coûteux « un point d’échange internet coûte 10 000 dollars US » en moyenne, a affirmé le Président de CIXA.
Il doit être géré par des professionnels et il est primordial qu’il ne « s’arête pas ».

Au-delà de l’aspect technique, lors de cette intervention, les participants ont été édifiés sur la nécessité de développer des contenus locaux et de l’apport de ce point d’échange internet aux fournisseurs de contenus. Par exemple, un fournisseur de contenu ; qui peut être un opérateur voulant faire la télé sur internet, peut le faire via un point d’échange internet.

Il faudrait appuyer le développement des contenus locaux ; encourager les fournisseurs de contenu au Cameroun à s’enregistrer sous le nom de domaine .cm afin qu’ils soient visibles ; 90% des sites consultés au Cameroun ne sont pas du Cameroun. Il faut donc aider les gens à développer des sites internet.

Sur la baisse des coûts de l’internet

L’experte Pauline Tsafak Doumessi a expliqué que « les coûts internet ont baissé de façon progressive. En 2012, ce n’est pas le même tarif qu’en 2003, surtout avec l’introduction de la concurrence du WACS, et un troisième opérateur de téléphonie mobile qui va implanter la téléphonie sur technologie 3G, les tarifs vont baisser ».

Pour Oliver Leloustre, Président de CIXA « en 2004, une connexion dédiée à 64 Kb coûtait 200 000 (400 US$) par mois et 400 000 FCFA (800 US$) de coût d’installation ». Ringo, la société qu’il dirige « a démarré l’internet à 25 000 FCFA (50 US$) par mois pour 1 Mb. En Europe, l‘équivalent coûte environ 40 US$ ».

Par ailleurs, il a expliqué que les coûts pour les utilisateurs sont aussi influencés par les obligations de couverture nationale de l’internet. Ce qui représente un coût pour les opérateurs, car le nombre de clients influe sur la rentabilité des opérations.

Par ailleurs, épinglant l’un des « vrais problèmes » déjà relevés lors des discussions sur les infrastructures ; Oliver Leloustre a révélé que « 60% des pannes d’un opérateur, c’est l’énergie, ce qui a une conséquence sur la disponibilité du réseau. L’accès à l’électricité est un problème ».

La question de l’énergie, qui n’a pas encore été débattue à ce Forum devra donc être remise sur la table car de là aussi en dépend l’accès universel et abordable pour tous à l’internet, que ce soit au Cameroun ou dans les autres pays d’Afrique Centrale, c’est l’un des nœuds du problème.

La seule phrase qui revient encore sur la baisse des coûts d’accès « la concurrence va baisser les coût ». Cela demande un marché de plus en plus ouvert mais aussi régulé, avec les réformes réglementaires en cours dans plusieurs pays.

Photo par Robert Hest. http://www.flickr.com/photos/rhest09/ Utilisé avec avec permission sous licence Creative Commons licence BY-NC-SA 2.0.



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