Pas de chichi, que des histoires numériques

Les histoires numériques, vous connaissez? Je vous explique. Vous vous

assoyez devant un ordinateur, pensez à une histoire qui vous touche et

vous fait vibrer, puis vous pondez un scénario. Un scénario de film,

pour être précis. Quelques heures plus tard, vous levez le regard sur

votre écran. Puis là, vous récoltez un bon petit film de votre cru…

Enfin presque.

Les histoires numériques, vous connaissez? Je vous explique. Vous vous assoyez devant un ordinateur, pensez à une histoire qui vous touche et vous fait vibrer, puis vous pondez un scénario. Un scénario de film, pour être précis. Quelques heures plus tard, vous levez le regard sur votre écran. Puis là, vous récoltez un bon petit film de votre cru… Enfin presque.

Les histoires numériques, c’est en réalité ce que Sylvie Niombo trimbale dans sa boîte à surprises lorsqu’elle se promène d’atelier en atelier. Cette fois-ci, le 10 septembre, la jeune Congolaise, a déballé le contenu de son sac à l’occasion d’un atelier dédié à la fabrication de courtes vidéos. Cet atelier, il faut le mentionner, avait ceci de spécifique qu’il s’adressait en premier lieu à des journalistes. Il prenait effectivement place dans le cadre de la conférence Highway Africa, un événement qui rassemble cette année près de 600 journalistes et médias africains.

Or, Niombo de l’Association pour le progrès des communications (APC) – un réseau d’ONGs oeuvrant pour que la technologie serve au développement dans les pays les moins fortunés – avait plus d’un tour dans son sac. L’un de ceux-là était Nicolle Beeby, une jeune sud-africaine qui partageait le crachoir à ses côtés.

Beeby, qui travaille à Women’sNet, une ONG destinée à élargir l’accès à l’internet et aux technologies de communication aux femmes, sait de quoi elle parle, lorsqu’il est question de récits numériques. En réalité, son organisation a élaboré le concept même de récits numériques.

L’atelier a commencé avec deux récits chocs, projetés sur écran géant, et par lequel des femmes africaines racontent de dures réalités. Une première raconte en quoi son affirmation et son émancipation lui ont coûté son mariage. Se voyant obligée de divorcer, elle a ainsi perdu tout soutien familial et a dû apprendre à la dure à subvenir aux besoins de ses enfants.

Le second film de trois minutes montre par une histoire superposée à des photos comment un couple de lesbiennes, à nouveau en Afrique, a subi des viols à répétition et une violence sans précédent lorsque leur homosexualité a été découverte.

Ces deux récits numériques de très courte durée, sont « un moyen émotif de raconter, de représenter des réalités », a affirmé Beeby. Et ça marche! Non seulement ces films ont-ils un impact automatique et donnent la chair de poule au spectateur, ils sont aussi relativement faciles à réaliser.

« Ce qui compte », affirme alors Niombo, « c’est d’utiliser sa propre narration, sa propre histoire, peu importe ce que vous tentez de dire ». Trois journalistes, l’un de Malawi, puis deux de la République démocratique du Congo, ainsi que quelques autres participantes étaient accrochés aux lèvres de la formatrice, qui assurait la partie française de l’atelier bilingue.

Les deux formatrices ont fait le tour des composantes d’une histoire numérique, avant de s’attaquer à la partie appliquée, soit celle qui s’attarde à la réalisation d’une courte vidéo à l’aide du logiciel Windows Media Maker. « Mis à part la nécessité de définir un message clair, il est impératif que la narration suive un certain rythme », ajoute alors Niombo. Les sons et l’imagerie (photos et vidéos) doivent s’agencer de façon bien douce.

J’ai pour ma part choisi d’abord un titre : « De l’empreinte digitale a l’empreinte écologique ». C’était la première fois que je tentais de définir un message et un scénario en seulement quelques minutes.

Mon histoire numérique avait pour message que je trouve absurde de faire des milliers de kilomètres pour assister a une conférence de quatre jours. Imaginez, moi qui ai quitté Montréal la semaine dernière, me retrouvant dans un coin perdu de l’Afrique du Sud, pour quelques jours uniquement… Faut quand même vouloir!

Petite parenthèse : Lorsque je suis arrivé à Grahamstown où à lieu Highway Africa, j’ai eu l’occasion de m’entretenir avec ma collègue Coura Fall, une Sénégalaise qui se démène pour que l’internet haute-vitesse devienne accessible et abordable en Afrique. Or, elle me disait qu’encore plus absurde que mon déplacement aérien, est ce qui se passe présentement à Dakar. La capitale Sénégalaise est en pleine reconstruction, hôtels, routes, boulevards, promenades. « Mais pourquoi subitement, comme ça? », lui ai-je demandé. « C’est pour la conférence islamique, bientôt, qui ne durera que deux jours ».

Enfin, durant l’atelier sur les histoires numériques, j’ai voulu lier ces deux anecdotes en apparence absurdes. C’est somme tout anodin comme histoire, si l’on compare avec ces récits de femmes africaines placées dans des situations impossibles. Le temps s’est écoulé et je n’ai pas pu monter de film, mais ce n’est que partie remise.

J’ai au moins capté le fond du propos de Sylvie Niombo et Nicolle Beeby, toutes deux dévouées à permettre aux femmes en situation de détresse de s’exprimer et se représenter par elles-mêmes. A ce sujet, je vous encourage à vous rendre sur site web de la campagne « Réapproprie-toi la technologie! » qui, pendant 16 jours en novembre, accueillera vos récits numériques portant sur la violence faite aux femmes.

Photo par Frédéric Dubois

Sylvie Niombo, Nicolle Beely et une participante à l’atelier sur les histoires numériques.

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